jeudi 5 mars 2009

Profession: tyran orthographique

J’ai passé les derniers jours à réviser les épreuves d’un dictionnaire visuel pour les Éditions Québec Amérique. Des heures et des heures de lecture de définitions, de ‘’gossage’’ de virgules, de questionnements profonds sur l’emploi de certaines locutions et de réécriture d’adjectifs numéraux en toutes lettres. Des heures et des heures de ‘’sacrage’’ aussi, à me décoller la rétine sur les minuscules caractères (6, genre…). Bilan : j’ai survécu et j’ai appris pas mal de choses à propos du réticulum endoplasmique et d’autres notions essentielles.

Je dois avouer que j’étais passablement stressée en renvoyant les quatre tomes aux éditeurs. C’était ma première collaboration à un dictionnaire et on s’entend qu’un dictionnaire, ben, tsé, c’est pas bourré de fautes à la base, c’est pas écrit par des analphabètes. Ces gens-là s’en rendent compte si tu leur remets un travail ‘’botché’’, si tu as oublié des fautes, si tu n’as pas vu toutes les coquilles… C’est donc en réprimant de nombreux haut-le-cœur d’angoisse que j’ai laissé le colis entre les mains de l’employé de Purolator, c’est le souffle court que j’ai ouvert le courriel envoyé par mon contact chez Québec Amérique quelques heures plus tard.
Le Dandy, qui me rassurait en disant que j’étais la meilleure, la plus compétente et toutes les choses qu’un chum dit à sa blonde dévorée par l’inquiétude, avait finalement raison : j’ai passé le test haut-la-main et j’ai déjà décroché un autre contrat avec Québec Amérique.

C’est hautement jouissif de gagner sa vie en corrigeant les mots des autres. Mon côté maîtresse-d’école-qui-reprend-tout-le-monde est enfin perçu comme une qualité et je peux barbouiller d’un rouge sang des pages et des pages de texte avec un plaisir sadique. Je sublime ainsi toutes mes pulsions meurtrières et ça fait sans doute de moi une bien meilleure blonde, une bien meilleure mère en devenir. Évidemment, il m’arrive également de faire des fautes, je suis humaine, trop humaine, et je me réveille parfois en sursaut, angoissée par un mot mal orthographié ou une construction grammaticale douteuse.
Certains craignent la mort, moi j’ai peur du mot. Une petite lettre de moins mais autant de tourments…

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